

Il est alpiniste. Il est ingénieur. Et il vit entre deux mondes qui, pour beaucoup, s’opposent. Mais Adil Taibi, lui, a décidé de ne rien sacrifier. Il gravit des les plus hauts sommets de la planète pendant ses congés, court les montagnes marocaines les week-ends, et finance ses rêves sans attendre qu’on les comprenne. Un tête-à-tête avec un homme qui avance pas à pas, sommet après sommet, vers une vie pleinement choisie.
Adil pose les bases. Pas de recette miracle, pas de formule magique. Juste une organisation rigoureuse. Cinq jours au bureau, puis un sac prêt pour le vendredi soir. Une montagne au programme, parfois le Toubkal, parfois une autre. Et chaque année, un mois de congés qu’il consacre à des sommets plus lointains.
Lui, il est ingénieur d’État. Et alpiniste. Il ne veut pas choisir.
Beaucoup pensent que c’est soit l’un, soit l’autre. Moi, je veux les deux.
Né dans la région de Larache, c’est à Khénifra qu’Adil Taibi grandit. Loin des 8000, mais tout près de l’endurance. Il débute par la course à pied, le marathon, la rigueur des longues distances. Et puis, un jour, il s’aventure plus haut. Au sens propre. Il monte. Il grimpe. Et il s’accroche.
Quand tu arrives en haut, tu es fatigué. Mais il y a une vue. Une sensation. Un instinct qui te pousse à revenir.
À 17 ans, il trace sa première grande traversée : 40 jours dans le Haut Atlas, seul, avec son sac, des cartes, et ce besoin de silence. C’était le début.
Il est monté au sommet du Toubkal. Puis de l’Aconcagua. Puis de l’Everest. Puis du K2. Et de bien d’autres. Chaque sommet a laissé une trace, une leçon.
Adil ne touche aucun revenu de l’alpinisme. Mais il y trouve tout : un rythme, une paix, une manière d’être au monde.
Adil a vendu un terrain pour gravir l’Everest. Pour lui, ce n’est pas un sacrifice, mais un acte logique : transformer un bien matériel en quelque chose d’immatériel, mais inestimable. « Quelqu’un qui vit à Rabat et veut aller à Marrakech doit dépenser de l’argent pour y aller. Moi, je choisis de gravir une montagne parce que c’est ce que j’aime. »
Son terrain ? Ni plus ni moins qu’une ressource comme une autre. Comme une voiture qu’on revend. Sauf que pour lui, cette somme devient un sommet, une expérience transmise.
Parce que la vraie richesse immatérielle, c’est celle qui reste toute la vie. Tu peux la transmettre à tes enfants, à tes petits-enfants, à ton entourage. Il y a un livre qui dit “Meurs vide” : c’est-à-dire, ne garde pas la connaissance pour toi, partage-la.
Il ne vit pas d’alpinisme. Il vit pour lui. Sans sponsor, sans subvention.
Et si certains lui demandent pourquoi il ne préfère pas acheter une maison ? Il sourit : « Une maison, c’est quatre murs. Moi, je préfère les horizons. »
« Le sport, au Maroc, c’est encore le football. » Le constat est clair. L’alpinisme n’a pas encore sa place. Pas de filière, peu de soutien, peu de modèle viable pour les jeunes.
Adil Taibi, lui, tente d’ouvrir une voie. Il parle aux étudiants, aux clubs, aux collèges. Il rêve d’une structure. D’une académie, pourquoi pas. Il aimerait qu’un jour, gravir une montagne soit autant valorisé que marquer un but.
Il faut former une nouvelle génération. Leur dire que c’est possible. Que la montagne leur appartient aussi.
Il le répète : l’objectif n’est pas le sommet. C’est ce qu’on devient en y allant.
Parfois il faut faire demi-tour. Changer d’itinéraire. Attendre une meilleure fenêtre. Accepter. Mais continuer.
Dans la montagne, tu ne peux pas tricher. Tu es seul avec toi. Et tu dois te regarder en face.
C’est peut-être pour ça qu’il y retourne. Pour cette façon qu’elle a de le remettre au centre. De lui rappeler ce qui compte.
Ce qu’il veut dire aux autres ? Que la passion est ce qu’on choisit. Vraiment. Que ce choix-là, on ne devrait jamais lâcher.
Le travail, les études, parfois tu les fais par défaut. Mais ta passion, c’est le premier choix que tu fais pour toi. Tu dois le tenir.
La montagne est un moyen de se réinventer, de se fixer de nouveaux objectifs et de découvrir de nouvelles aventures. À chaque sommet atteint, un autre apparaît, et ainsi de suite. C’est une source inépuisable de croissance et d’inspiration.
Et peut-être que la montagne n’est qu’un prétexte. Une métaphore. Ce qui compte vraiment, c’est ce qu’on cherche à atteindre. Le sommet est un cap. Mais l’aventure, elle, commence bien avant.
L’audio qui retrace l’intégralité de notre rencontre avec Adil Taibi est disponible en exclusivité juste ici :
👉 Cet article t’a plu ? Tu peux retrouver d’autres portraits de vies réinventées dans notre série En tête-à-tête. Des voix qui ont choisi de gravir leur propre sommet, à leur façon.
La réflexion qu’on entend le plus depuis qu’on vit en van, c’est : “vous faites bien de le
Près du village d’Imilchil et du lac Tislit, cette randonnée jusqu’au Bab N’ouyad vous plong