En tête à têteTamara Cornejo : un pas à la fois sur le Pacific Crest Trail
Tamara Cornejo avec Voix Nomades

Tamara Cornejo : un pas à la fois sur le Pacific Crest Trail

Cinq mois. Plus de 4200 kilomètres. Des paysages qui changent chaque jour, des conditions qui bousculent, et un rythme qui devient celui du corps et de la nature. Quand Tamara Cornejo s’engage sur le Pacific Crest Trail – ce mythique sentier qui traverse les États-Unis du Mexique au Canada – elle ne cherche pas la performance. Elle veut simplement avancer… un pas après l’autre.

Le film Wild comme appel à l’aventure

Pour Tamara, tout commence bien avant de poser le pied sur le PCT. L’envie a germé à la sortie d’un film : Wild. L’histoire de Cheryl Strayed, partie seule sur le sentier pour se reconstruire, résonne profondément.

 

Il y a tout : l’acte de courage de partir seule en tant que femme, d’affronter ses démons au fil de la marche… et cette dimension libératrice, presque guérisseuse, que seule la marche peut offrir. 

Les années passent. La randonnée devient un fil conducteur discret de sa vie : sorties mensuelles, voyages ponctués de sommets. Puis vient le bon moment. Un contexte professionnel qui lui laisse du temps, et surtout ce besoin viscéral de revenir à l’essentiel : vivre simplement, dehors, au rythme du jour et de la nuit.

Plonger dans l’inconnu du PCT

Quitter son entourage, ses repères et ses habitudes n’a rien d’anodin. Avant le départ, Tamara doute : aura-t-elle l’énergie ? La force mentale d’aller jusqu’au bout ?

Avant de prendre la décision de faire le PCT, je n’avais jamais fait de rando de plus de trois jours. Une fois la décision prise, j’ai tenté une semaine… puis je suis passée d’une semaine à cinq mois.

Le jour où elle s’élance, c’est sous la pluie et dans un froid inattendu pour ce qu’on appelle “la section du désert”. Les nuits sont glaciales, les vêtements mouillés… et pourtant, malgré l’inconfort, la marche s’impose comme une évidence. « Je crois qu’au fond, je cherchais ça : être bousculée. »

Cinq mois à vivre avec la nature

Photo de Tamara Cornejo

Sur le Pacific Crest Trail, la montre, c’est le soleil. On se lève tôt, on se couche tôt. On apprend à lire la lumière et la météo pour décider de la journée.

Chaque section est un monde : le sable chaud du sud de la Californie, les crêtes enneigées de la Sierra Nevada, les forêts profondes de l’Oregon, les montagnes sauvages de l’État de Washington.

La faune accompagne le voyage : un ours noir aperçu au loin, un autre croisé à quelques mètres, des serpents à sonnette qui forcent à ralentir, des pumas dont on entend seulement les histoires.

Sur le PCT, tu n’es jamais vraiment seule… la nature te regarde.

Les hauts, les bas, les révélations

Le mur arrive au troisième mois. La fatigue physique s’installe, l’appétit diminue, le corps proteste. En Oregon, une pause de quelques jours auprès de sa mère rend la reprise plus difficile encore.

Puis il y a cette rencontre : un alpiniste français croisé juste avant une section enneigée. Il lui apprend à manier le piolet, à utiliser une corde – rare sur le PCT. Ce geste change tout : sans lui, elle n’aurait peut-être pas franchi certaines passes. Son surnom, “Lifeline”, naît de là.

Et puis, il y a les instants magiques : partir de nuit pour atteindre un col au lever du soleil, avancer en équipe sur des passages techniques, sentir que chaque pas rapproche du but… et de soi-même. « Ces matins-là, quand le soleil se levait sur la Sierra Nevada, je savais exactement pourquoi j’étais là. »

Se motiver, un pas à la fois

Sur un sentier aussi long, penser uniquement à l’arrivée est un piège. Tamara se concentre sur l’étape suivante : un point d’eau, un coin pour camper, une pause déjeuner.

Elle apprend à écouter son corps, à réduire la distance quand la fatigue s’impose, à accélérer quand l’énergie revient. La performance n’est pas l’objectif ; la constance, si.

Ne regarde pas la carte entière : vise juste le prochain pas. La prochaine pause. L’étape suivante.

Une aventure qui transforme

L’arrivée est un mélange de soulagement et de tristesse. Soulagement d’avoir tenu. Tristesse de voir se terminer ce quotidien simple et brut.

Le retour à Montréal est un choc : le bruit, les lumières, le rythme effréné contrastent violemment avec cinq mois passés dehors. Pourtant, le Pacific Crest Trail laisse en elle une empreinte durable : une présence accrue au moment présent, un goût affirmé pour la simplicité, une connexion profonde à la nature et à soi.

Tamara le sait : il n’est pas nécessaire de marcher des milliers de kilomètres pour vivre l’aventure. L’esprit du PCT peut se glisser dans les petites choses : explorer un nouveau quartier, goûter un plat inconnu, se laisser surprendre par un chemin jamais emprunté.

Avancer un pas à la fois, dehors ou dans la vie. Garder cette liberté en soi, comme un fil invisible entre les grands espaces du Pacific Crest Trail et les jours ordinaires.

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Bonnes lectures!